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INAUGURATION
La fête de la nouvelle commune
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Pour marquer la naissance officielle de la nouvelle commune de Malakoff, deux journées de fêtes ont été organisées les 1er et 2 février 1884 : rues pavoisées, retraite aux flambeaux, feux d’artifices, banquet républicain et discours de circonstances. Compte rendu dans l’hebdomadaire Le bon citoyen de Malakoff.

Vendredi 1er février 1884 Malakoff-Commune vient au monde au milieu de la joie. C’est la suite de nos élections triomphantes. On sait que le Conseil municipal s’est réuni ce jour là à neuf heures du matin, pour nommer le Maire, les deux adjoints et délibérer sur les affaires les plus urgentes. A l’unanimité sont nommés : Maire, Monsieur Féburier ; 1er adjoint Monsieur Riotte ; 2ème adjoint, monsieur Gilbert. Des bombes sont lancées sur la place des écoles pour annoncer à la population la nouvelle.

Dans la journée de vendredi, toutes les habitations particulières, les écoles sont pavoisées : la Mairie, rue du Camp Français, est illuminée. Quelques maisons sont aussi illuminées, mais l’élan général est paralysé par un vent violent.

Le soir, grande retraite aux flambeaux, avec pièces d’artifices, et arrêt devant l’habitation des autorités municipales. Femmes, enfants, jeunes gens, vieillards, tout Malakoff en chantant suit la bannière de nos braves pompiers. A la lueur des torches et au scintillement de leurs casques, ils ressemblent aux cuirassiers de Reischoffen.

Journée de samedi : Un grand banquet doit avoir lieu le soir à sept heurs chez Filleau, rue de la Tour. Tout le monde a le droit d’y venir. Seul le malade, le malheureux, l’ouvrier sans travail ou trop chargé de famille ne pourra pas prendre part des réjouissances publiques. Ce ferait tache au tableau. A cette pensée douloureuse, deux hommes de bien, deux cœurs généreux qu’on est toujours sûr de rencontrer lorsqu’il s’agit de Fraternité vont à domicile solliciter des dons en argent et en nature pour les nécessiteux. Dût leur modestie en souffrir, je publierai ici leur noms. Ce sont Messieurs Chantoux et Leconte….Argent et dons en nature ont été distribués.

Chez Filleau : A sept heures et demie, tous les convives, au nombre de 180, sont en place armés de leur couteau et de leur fourchette. Monsieur Defrance, chef de bureau à la Préfecture de la Seine, représentant l’administration supérieure, est là et préside le banquet. A ses côtés, monsieur Féburier maire et ses deux adjoints. Tous les conseillers municipaux sont aussi présents. Les notables de Malakoff, les commerçants, employés, ouvrier, un grand nombre de dames en toilettes soignées sont là. Les opinions politiques les plus diverses sont représentées. Chacun se félicite de l’excellente tenue des convives et de la concorde qui parait règner dans les esprits.

Les gigantesques et délicieux turbots à la Malakoff servi par Filleau ont eu un énorme succès. Un farceur affirme qu’il a été pêché le matin dans les lacs de la rue Augustin-Dumont.

Comme dans tous les banquets, plus on approche du dessert, plus les conversations s’animent, deviennent bruyantes. On dit que les dames sont bavardes…Et les hommes ? De vraies pies jacassières…

Au dessert : la sonnette est agitée. Monsieur Mirbelle fils porte, au nom du comité républicain démocratique, un toast au premier Maire de Malakoff, à Monsieur Féburier (applaudissements). Monsieur le Maire se lève et, d’une voix forte, qui est entendue de toute la salle, il nous parle du nouvel enfant qui vient de naître : de Malakoff dont il a déjà soutenu les intérêts au conseil de Vanves et qui vient d’entrer comme commune dans la grande patrie française. L’enfant est tout mignon, tout joli et son sourire est charmant, mais ses membres sont si fragiles, si délicats. Monsieur le Maire fait appel au concours et à l’union de tous pour soigner et protéger le nouveau-né (vifs applaudissements).

Monsieur Defrance prononce ensuite un très beau discours qui a été fréquemment interrompu par les applaudissements. Vous pourrez compter, dit-il, sur les bons rapports, sur la protection de l’administration supérieure. Ses chefs de service feront leur possible pour aider Malakoff a devenir une commune modèle.

Monsieur Defrance porte d’abord un toast à Malakoff dont le nom lui rappelle la bravoure en Crimée de l’armée française. Il boit à notre brave armée, qui en ce moment, là-bas, bien loin, tient haut et ferme le drapeau national. Il finit en portant la santé du premier magistrat de la République, di digne et vénéré Jules Grévy. Toute la salle est debout et crie : Vive Jules Grévy. Vive la République !

Monsieur Chapelier, oubliant les luttes électorales d’hier, a prouvé qu’il aimait son pays en venant réciter une petite pièce de vers qui a été appréciée et applaudie.

Monsieur Gilbert, l’un des adjoints, après les discours qu’on venait d’entendre, n’a voulu prononcer que quelques mots, mais comme un sonnet, ils valaient à eux seuls tout un long poème. Messieurs s’écrit-il d’une voix émue, je bois à l’union et à la concorde de tous les habitants de Malakoff.

Un brave de la vieille armée de Crimée, monsieur Hagais, vient ensuite prononcer un petit discours patriotique qui a jeté dans le cœur de la jeunesse, la flamme douce de l’espérance.

Le banquet à dix heures et demie était terminé. L’aimable Mirbelle, pique au corsage de toutes les dames de jolies fleurs et tout le monde se dirige du côté de la salle André-Gérard, avenue Pierre Larousse, où le bal doit avoir lieu.

A six heures du matin, cette fête charmante s’achevait ne laissant après elle que l’union et la gaieté.

Armand Ferrand

Article paru dans l’hebdomadaire « Le bon citoyen de Malakoff », le dimanche 10 février 1884.


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