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CHAUVELOT, UN TOUCHE A TOUT
Du cordonnier au chanteur de rue
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Ce parisien qui nait quelques années après la Révolution, issu d’une famille populaire suivra au début de sa vie professionnelle les traces de son père cordonnier. Mais le jeune homme se forgera d’autres ambitions pour sortir de son milieu. Pendant une dizaine d’années il se fera poète et chansonnier. Les thèmes patriotiques lui apporteront une certaine notoriété. Un drôle d’itinéraire.

 Alexandre Chauvelot naît à Paris le 22 frimaire de l’an V (12 décembre 1796), rue Jacinthe, sur la rive gauche (1). Il est l’enfant naturel d’Anne Chauveleau, ouvrière en linge, et d’Alexandre David, marchand mercier. Conformément au milieu populaire dont il est issu, il occupe, durant ses premières années de jeune homme, des emplois à la fabrique et à l’atelier. En 1817, année de son mariage avec Marie Trouvin, une jeune couturière d’à peine 15 ans, il exerce, comme son beau-père, le métier de cordonnier (2).

La vie d’ouvrier ne lui convenant pas, il délaisse rapidement l’atelier et décide de se faire, sous la Restauration, poète et chansonnier de rues. Adoptant le patronyme de son père et signant ses oeuvres Alexandre David, il écrit pendant une dizaine d’années de nombreuses chansons dans lesquelles il aborde tous les genres lyriques : romance, gaudriole ou poésie bachique. Mais c’est surtout le registre patriotique qui lui confère une véritable notoriété. La légende napoléonienne inspire à cet enfant de l’Empire nombre de paroles. Ainsi pleure t-il amèrement le retour des Bourbon qui « changea la couleur tricolore en ruban blanc et l’aigle en fleur de lys » (3).
 
D’ailleurs, aucun des deux souverains de la Restauration ne semble trouver grâce à ses yeux. Une chanson écrite sur l’air de la marseillaise en 1830, après la Révolution de juillet, tord le cou au régime défunt et proclame : « depuis quatorze années, on nous faisait porter un joug, mais en moins de quatre journées, vous avez rompu le licou » (4).
 
POUR LE LIBERALISME ET L’ORDRE
 
En 1830 il appartient d’ailleurs à la 3e compagnie du 4e bataillon de la 6e légion de la Garde nationale, tout juste réorganisée, uniforme qu’il porte notamment pendant ces 3 journées de Révolution, ce qui lui vaut une médaille au titre des « décorés de Juillet » (5). Au mois de novembre suivant, il est de faction au donjon de Vincennes où sont enfermés les ministres de Charles X (6). Dans ces circonstances, il accomplit sa tache, en dépit des sentiments que lui inspire le régime déchu et selon ses propres mots, « avec cette fermeté de citoyen qui n’exclut point les égards et l’humanité que l’on doit aux grandes infortunes » (7) . Son passage à la Garde nationale se fait, toujours selon ses mots, dans un « dévouement à toute épreuve aux institutions libérales de son pays ».
 
S’il paraît difficile d’établir un portrait « politique » précis des opinions de Chauvelot, les différents écrits qu’il a pu laisser – même envisagés avec circonspection – d’une part, et ses engagements d’autre part, nous permettent au moins d’en tracer les contours. En effet, le rejet des Bourbon est net et, si le souvenir de l’Empire semble toujours vif dans sa mémoire, il paraît néanmoins s’accommoder sans trop de mal de la Monarchie de Juillet. Libéralisme et ordre garantis par un régime stable, voici en effet qui ne peut que convenir à un individu désirant réussir dans les affaires.
David Berthout
Service de documentation
Archives nationales

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1) Archives de Paris, 5Mi 2 801. La rue Jacinthe a disparu lors du percement de la rue Lagrange dans les années 1880.

2) Mariage entre Alexandre Chauvelot et marie-Augustine-Félicité Trouvin le 4 décembre 1817 à Paris, ancienIVe arrondissement, Archives de Paris, 5Mi 2 1061.

3) « Raguse ou paroles adressées à lui, par un de ses anciens compagnons d’armes ». Air du léger bateau. Par Chauvelot (Alex. David), Bibliothèque nationale de France, YE-56375 (417).

 4) « La parisienne. Chant national ». Air de la Marseillaise.
Par Chauvelot (Alex. David). Bibliothèque nationale de France, YE-56375 (417)
 
5) « Album des décorés de Juillet », Paris, Imprimerie A. Mie, 1831.
 
(6) Chauvelot, Alexandre, Vingt-quatre heures au donjon de Vincennes, cité dans Castillon d’Aspet, Héliodore (dir. A. Chauvelot), Guide à la Tour Malakoff et à la Californie parisiennes, rendez-vous de la bonne Société, aux portes de la capitale, imprimerie E. Brière, Paris, 1860. Nous n’avons retrouvé à ce jour aucun exemplaire
de cette publication.
 
7) Castillon d’Aspet, Héliodore (dir. A. Chauvelot), Guide à la Tour Malakoff et à la Californie parisiennes, rendez-vous de la bonne Société, aux portes de la capitale, Paris, imprimerie E. Brière, 1860.
 

La photographie qui illustre cet article est un document prétexte montrant un cordonnier au début du 20ème siècle.


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