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AU BON LAIT DE MALAKOFF
Les laitiers-nourrisseurs et leurs étables à Malakoff (1)

Le commerce du lait produit sur place en ville avec des vaches à l’étable a connu à Malakoff une intense activité jusque la Seconde Guerre Mondiale. Il y a eu à Malakoff jusqu’à 21 fermes urbaines. La dernière a fermé ses portes dans les années 1960. Retour sur cette insolite présence des vaches au coeur de la ville.

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Le commerce du lait produit sur place en ville avec des vaches à l’étable a connu à Malakoff une intense activité jusque la Seconde Guerre Mondiale. Il y a eu à Malakoff jusqu’à 21 fermes urbaines. La dernière a fermé ses portes dans les années 1960. Retour sur cette insolite présence des vaches au coeur de la ville.

D’une conservation difficile avant les techniques modernes et en l’absence de moyens de transport ad-hoc, une bonne partie du lait consommé dans les villes était produite sur place par les laitiers- nourrisseurs qui possédaient leurs propres étables appelées au 19ème siècle « vacheries » auxquelles étaient adjointes la plupart du temps un magasin permettant la vente directe du lait frais et de produits laitiers.

Ce lait des fermes urbaines était aussi livré au domicile des clients dans des seaux ou en bouteille avec une carriole tirée par un cheval comme le montrent plusieurs cartes postales des rues de Malakoff avant 1914 .

L’apogée de cette profession se situe sous la troisième République. En 1873 il existe sur la commune de Vanves 8 vacheries à lait dont 6 sur le jeune quartier de Malakoff. Et cette activité n’a cessé de se développer. Ainsi, en 1875 il y avait à Paris 458 vacheries et en banlieue 833 dont près d’une vingtaine à Malakoff. Un article de l’hebdomadaire Républicain ’Rive gauche », écrit alors « qu’on reconnaît Malakoff les yeux fermés ; rien qu’à l’odorat. Les bêtes restent à l’étable une partie de l’année puis vont se refaire une vigueur en province... »

Le terme de laitier-nourrisseur avait été admis par l’Académie française dès 1835 qui désigne « celui qui se livre à l’industrie d’engraisser les bestiaux et qui, dans les villes ou les faubourgs, nourrit des vaches à l’étable pour faire commerce de leur lait »(1)

La corporation des laitiers-nourrisseurs de la Région parisienne représentait un métier très contraignant qui obligeait à fournir de longues journées, et exercé particulièrement par des migrants. La plupart des auvergnats du Cantal monté à Paris qui se sentaient à l’aise dans ce métier très proche de celui d’éleveur qu’ils connaissaient bien. A ces provinciaux s’adjoignent par la suite des bretons, surtout après 1920. L’on sait par exemple que Géraud Victorien Gaillard, dit Victor, né en 1868 à Anglards de Salers (Cantal) était nourrisseur à Malakoff en 1900 rue Gambetta. L’étable se situait sur le terrain qui accueille désormais le Centre de santé Marie-Thérèse.

21 fermes à Malakoff en 1905

Le nombre important de vacheries à Malakoff s’explique notamment par la forte progression de la population. En 1886 Malakoff compte 8116 habitants. La production de lait frais est à la fois conforté par le fort développement de la consommation du lait, la stabilisation des familles et la construction de l’école en 1875, trois éléments incitateurs et sécurisants pour le commerce des produits laitiers en ville.

Les annuaires des laitiers-nourrisseurs de Paris et de la banlieue fournissent de précieuses informations sur l’implantation géographique et le nombre de laitiers nourrisseurs en Région parisienne (2). Concernant la ville de Malakoff les chiffres révèlent l’importance de cette activité. Les fermes produisant du lait à Malakoff sont 17 en 1886, 19 en 1892, 21 en 1905, 12 en 1920, 2 en 1938 pour finir à une seule entreprise avenue Pierre Larousse en 1950. On peut donc estimer qu’au début du 20ème siècle il y avait dans les étables de Malakoff plus d’une centaine de vaches. 

L’annuaire de 1890 est très précis avec noms et adresses des 19 laitiers-nourrisseurs exerçant à Malakoff : Arnould (48 rue de Chatillon), Barbès (3 rue Caron), Berbigier (15 rue des oiseaux), veuve Bourdon (adresse non précisée) , Bouvelot (31 rue de Malakoff), Dumas (10 rue Edgar-Quinet), Fournier (118 route de Chatillon), Froquière (10 rue Edgard Quinet), Gauthier (47 rue Gambetta), Joly (34 route de Chatillon), Maisonnoble (rue Soufflot), Marguet (7 passage Sabra), Chanson (63 route de Montrouge), Ouzoul (3 rue du puits), Pagès et Compagnie (passage Larousse),Pégorier, rue Victor Hugo), Prunet (adresse non précisée), Recurat (45 rue Gambetta), Vaurès (141 rue de Montrouge).

L’annuaire de 1890 dresse par ailleurs la liste des 50 marchands de vaches laitières en Région parisienne dont monsieur Joly installé avenue de Chatillon à Malakoff.

Les vaches normandes ou flamandes principales races entretenues dans les étables à l’intérieur de la ville de Malakoff durant plus d’un demi siècle étaient soumises durant plusieurs semaines à une stabulation absolue et permanente, nourrie intensément, elles produisaient environ 20 litres de lait par jour en début de lactation. Généralement non fécondées, elles étaient gardées 8 à 10 mois. Comme leur alimentation ne variait pas, elles engraissaient en fin de
lactation ; leurs carcasses étaient appréciées par la boucherie.

La guerre de 14-18 à entraîné une forte diminution du nombre de laitiers-nourrisseurs partout en Région parisienne. Malakoff passe de 21 en 1905 à 12 laitiers-nourrisseurs en 1920. Mais les causes de la disparition progressive du métier sont multiples explique Michel Pethieu (3) : « urbanisation, difficultés d’approvisionnement en bétail et en fourrage vert du fait de l’extension des surfaces bâties, réglementation plus contraignante concernant la salubrité des installations et l’état sanitaire des animaux, pression des habitants incommodés par les odeurs et les mouches, le tarissement de l’immigration auvergnate...Et surtout indique-t-il l’amélioration de la qualité des laits de ramassage pasteurisés ou stérilisés, la concurrence des grandes sociétés laitières (Maggi, Fermiers Réunis, Hauser...) et leurs publicités massives.. »

1)Lait d’hier, lait d’aujourd’hui, d’olivier Fanica, Revue d’Ethnozootechnie N°86 (2009)

2)Archives Bibliothèque Historique de la ville de Paris

3)Du lait pour Paris, un métier disparu : laitier-nourrisseur dans la Région parisienne de Michel Pethieu (2003)

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AU BON LAIT DE MALAKOFF
La ferme centrale de Malakoff, rue Pierre Larousse (2)

Les plus anciens habitants de Malakoff se souviennent encore de la dernière ferme de la ville, la Maison Corn « la ferme centrale de Malakoff » du 73 avenue Pierre Larousse en plein cœur de la ville qui comprenait une étable précédée d’une cour avec son abreuvoir. Sur rue une petite maison d’un étage accueillait la boutique de vente du lait. Témoignages.

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Les plus anciens habitants de Malakoff se souviennent encore de la dernière ferme de la ville, la Maison Corn « la ferme centrale de Malakoff » du 73 avenue Pierre Larousse en plein cœur de la ville qui comprenait une étable précédée d’une cour avec son abreuvoir. Sur rue une petite maison d’un étage accueillait la boutique de vente du lait. Témoignages.

Dans le quartier nord de Malakoff, on se souvient encore de "la ferme centrale " de la rue Pierre Larousse. Il faut dire que même durant les années 1960 cette entreprise d’un autre âge avec des vaches en plein centre ville avait de quoi surprendre. Elle était encore fortement appréciée des familles.

Une publicité de 1937 vantait déjà « son lait spécial pour enfants et malades garanti pur et non écrémé, ses œufs frais du jour et son beurre frais ».

Cette ferme urbaine comptait en permanence cinq à six vaches dévolues exclusivement à la production du lait destinée à la consommation des familles de Malakoff.

Michel Le Bas se souvient quand enfant, il allait chercher du lait frais à la « ferme centrale » de la rue Pierre Larousse.(1) « Tout le monde savait dans le quartier, rapporte-t-il que chaque jour vers 17h30 on pouvait avoir du lait frais. La petite boutique vendait aussi dans des récipients ronds en fer des fromages blancs. La dame du magasin prenait le lait dans des grands bidons blancs à l’aide de mesures d’un litre ou d’un demi litre.

A cette époque la laiterie possédait sa propre camionnette. Tous les lundis le laitier revenait avec son véhicule chargé de foin qu’il allait chercher je ne sais où. Je me souviens aussi que durant l’été dans les années 40-50 il montait ses quatre ou cinq vaches du côté de ce qui est aujourd’hui le stade Marcel Cerdan. Dans cette partie sud de Malakoff près du Fort de Vanves il y avait jusqu’à la ligne de chemin de fer beaucoup d’espaces libres, notamment un grand terrain qui appartenait à la Compagnie des Chemins de fer... »

L’attraction du changement des vaches

Jean Juillet, né à Malakoff en 1933 habitait rue de la Tour et a travaillé durant plusieurs années au magasin « Linos » en face de la « ferme centrale ». Il se rappelle de l’intense activité quotidienne de la boutique. « Matin et soir, dit-il, on voyait des femmes ou des enfants avec leur petit pot de lait en aluminium venir chercher du lait frais. Madame Corn puisait le lait dans une grande cuve avec une louche de décalitre... » Pour la nourriture des animaux « chaque semaine je voyait un camion qui apportait du foin car les vaches n’avaient bien sûr aucune prairie pour se nourrir.. Mais c’est l’échange des vaches toutes les quatre à cinq semaines qui représentait la principale attraction de l’avenue Pierre Larousse, surtout quand une des vaches s’échappait lors de la descente ou la montée dans la bétaillère. »

Jean Pierre Mallian, l’ancien projectionniste du cinéma alors situé rue Pierre Larousse se rappelle lui aussi que les vaches étaient changées régulièrement afin qu’elles ne passent pas leur vie dans une étable de ville ... ».

L’activité de la ferme était aussi rythmée par l’enlèvement du fumier deux à trois fois par semaine, soit par des marchands de fumier ou bien pris directement par des maraîchers pour leurs champs de légumes.

La cessation d’activité de la « ferme centrale » de Malakoff dans les années 1960 a mis fin définitivement à la présence des vaches en plein cœur de la ville.

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1) aujourd’hui occupé par le service culture de la Mairie. L’abreuvoir existe toujours. La boutique est aujourd’hui occupée par un magasin de photos  

La carriole du laitier prête pour les livraisons devant la ferme de la rue Pierre Larousse au début du XXème siècle                     

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