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MEMOIRES FAMILIALES 14/18
"Pour mon grand-père il était nécessaire d’en parler"
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Le grand-père de Simone Goffard, clairon pour sonner l’alerte au gaz moutarde évoquait librement et fréquemment son quotidien dans les tranchées, les gueules cassées, la boue, la faim, la disparition des copains, mais aussi la solidarité qui existait entre les soldats. Et par la suite à sa famille la transmission de l’amour de la Patrie, la tolérance et le devoir de mémoire.

« Mon grand-père paternel (1) a été incorporé en 1914, il a participé à toutes les campagnes : Verdun, Douaumont, le Chemin des Dames.... Il était clairon, chargé de sonner l’alerte quand les ennemis allaient gazer. Il me parlait de ce qu’il avait vécu : la solidarité qui existait entre les soldats, les gueules cassées, la boue, ne pas allumer deux cigarettes de suite pour éviter d’être une cible pour les Allemands car les tranchées étaient très rapprochées.

Il évoquait son quotidien à la guerre, ses amis morts. Il avait défendu son pays comme son père, mort en 1870, l’avait fait avant lui. Je ne sais pas si mon grand-père avait été traumatisé par la guerre. Il me parlait librement des choses qu’il avait pu voir. Il était malheureux mais pas triste. Ses camarades étaient morts dans les tranchées, il n’avait plus de copains de cette époque-là, ni de son régiment.

A son retour, il n’a pas pu reprendre son travail car il avait respiré trop de gaz. Il devait d’ailleurs vivre six mois de l’année à la campagne. Pour lui, il était nécessaire d’en parler : « Les gueules cassées, on leur a brisé toute leur vie ! », disait-il. Mon grand-père me parlait souvent de 14-18. Il me disait : « Les hommes politiques nous ont menés là, il faut que tu écoutes et réfléchisses car ils recommenceront. » Et il avait raison. « On était dans les tranchées, on ne mangeait pas, des copains perdaient une jambe, n’y voyaient plus clair, et pendant ce temps d’autres étaient dans les cafésTu trouves que c’était juste ?! ».

J’étais sa seule petite-fille. « Quand je serai mort, donne tout ce qui concerne la guerre à Simone », avait-il demandé à ma grand-mère. Mon grand-père m’a transmis l’amour de mon pays et une qualité : savoir respecter les plus pauvres et ne jamais dédaigné le travail d’en bas. Il m’a aussi communiqué un message de tolérance. Il a surtout mal supporté que les hommes s’agressent entre eux. Pour lui, la tolérance, c’était se comprendre, pas s’agresser. C’était un homme adorable, il m’emmenait me promener dans la campagne, m’apprenait les plantes et me montrait des images dans le magazine L’Illustration. C’était merveilleux pour moi.

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(1)Témoignage de Simone Goffard, petite-fille de Victor Montet, soldat de la première Guerre mondiale, mort en 1940

(2) Témoignage recueilli par Stéphane Laforge dans le cadre de l’exposition « Mémoires de poilus » organisée par la Commission municipale « Mémoire et patrimoine » en novembre 2014 avec le concours du Service communication de la Mairie de Malakoff. Travail coordonné par Cécile Lousse et Florence Giacomelli.

 

 


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